Quand la pleine conscience libère la parole
Pierre Senécal, D.Ps., expert-conseil SQETGC
L’hiver dernier, deux groupes du CISSS de l’Abitibi-Témiscamingue ont participé aux neuf séances d’apprentissage à la pleine conscience visant la réduction de l’anxiété (MBSR).
Composé de six usagers (les participants) ayant des troubles anxieux et autres comorbidités, le premier groupe comprenait notamment deux usagers présentant un trouble de phobie sociale se caractérisant par des comportements d’évitement de participation à des activités sociales. Quelques périodes d’exposition graduelle en groupe leur ont permis de participer pleinement à l’ensemble des activités de méditation. Quatre usagers ont complété la formation avec succès. Le second groupe était composé d’intervenants (les accompagnateurs) œuvrant dans une RAC.
À différents niveaux, une réduction significative de leurs symptômes d’anxiété a été observée (via des indicateurs mesurables). Les intervenants rapportent qu’aujourd’hui, ils sont capables d’exprimer avec des mots ce qu’ils ressentent intérieurement (nommer les émotions, les sensations physiques déplaisantes ressenties, la situation anxiogène, demander de l’aide). Au lieu de ruminer constamment des pensées anxiogènes, ils ont appris à s’ouvrir à l’autre sans crainte d’un jugement négatif.
Cette nouvelle prise de la parole en pleine conscience a contribué à réduire la probabilité de passage à l’acte visant à se soulager de l’emprise de l’anxiété.
Les usagers ont également développé une nouvelle habileté qui leur permet de valider leur interprétation sur une situation donnée perçue comme déplaisante afin de mieux comprendre leur interaction avec les autres. Les intervenants ont noté une plus grande capacité d’écoute au lieu de réagir rapidement face à l’autre.
De leurs propres séances de pleine conscience, les intervenants rapportent que la pratique de la méditation facilite l’apprentissage du « lâcher prise » dans des situations où il ne peut y avoir de possibilité de prise de contrôle sur les situations anxiogènes. Prendre soin de soi en prenant du temps pour soi tous les jours n’enlève rien à tout ce que l’on doit faire dans nos occupations quotidiennes. Les aprioris des intervenants quant aux « incapacités des usagers » à exprimer verbalement ce qu’ils ressentent intérieurement renforçaient leur fausse croyance « d’incapacité des usagers » à pouvoir réduire leurs symptômes d’anxiété. Il ressort de cette expérience que le potentiel des usagers est plus grand que la perception que les intervenants entretenaient au départ à leur égard. Une intervenante souligne qu’elle porte moins de jugement négatif sur ses réalisations quotidiennes en exprimant plus de bienveillance par rapport à elle-même. De plus, on ne plaît pas moins aux gens quand on est moins exigeant envers soi-même. Les échanges entre les intervenants sont plus ouverts, il y a moins de craintes concernant leur propre jugement négatif et celui des autres.
En terminant, les nombreuses recherches portant sur la pleine conscience montrent que la pratique quotidienne de la méditation augmente la probabilité d’encourager et de maintenir la libération de la parole.
Pour en savoir plus sur le « Programme d’apprentissage à la pleine conscience » offert aux CISSS et aux CIUSSS par le SQETGC (Pierre Senécal) :
http://sqetgc.org/formation/formations-sur-mesure/